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Sorj Chalandon

Journaliste et écrivain, Sorj Chalandon est célébré autant dans le domaine du journalisme que dans celui de la littérature. Prix Albert Londres en 1986, couronné par le prix Médicis, le Goncourt des lycéens et le grand prix de l’Académie Française, entre autres, pour plusieurs de ses romans, il consacre sa vie à écrire la guerre, ses abominations et ses procès, ainsi qu’à exorciser ses souffrances d’enfant privé d’amour. 

Sorj Chalandon, d’une enfance malheureuse à (la) Libération

Né à Tunis en 1952, Sorj Chalandon grandit à Lyon. Originellement prénommé Georges, il adopte le prénom Sorj qui est le surnom que lui donnait sa grand-mère. Sorj Chalandon vit une enfance malheureuse, sous l’emprise de son père mythomane et raciste, au passé trouble. Sa mère, impuissante et terrorisée, assiste passivement à l’emprise du père sur Sorj, enfant qui souffre de bégaiement et d’asthme, et sur son frère. Cette figure paternelle sera l’une des obsessions de Sorj Chalandon et l’un des leitmotivs de son œuvre romanesque. 

A 16 ans, il quitte Lyon pour Paris où il vivra dans la rue pendant un an et demi. Il y rencontre des militants politiques et s’engage au sein de la Gauche Prolétarienne. Quelques années plus tard, il participe à la création du journal Libération où il entre en 1974 en tant que dessinateur. C’est le début de sa longue carrière de journaliste. 

 

Un journaliste dévoué et consacré 

De ses débuts à Libération en 1974 en tant que dessinateur, Sorj Chalandon évolue en tant que monteur de pages, puis journaliste, chroniqueur judiciaire et grand reporter de guerre. A partir de 1977, il est envoyé en Irlande du Nord pour couvrir le conflit qui oppose républicains et nationalistes. De cette expérience et de ses multiples séjours entre 1977 et 2006, il est marqué à jamais et il reste lié à l’Irlande du Nord, sa langue, son histoire et sa culture, dont il tombe amoureux et qui lui inspirera plusieurs de ses romans. Après l’Irlande du Nord, c’est le Liban qui bouleverse Sorj Chalandon. Entre 1981 et 1987, il couvre la guerre civile. Profondément hanté par des massacres comme celui de Sabra et Chatila, en septembre 1982, il en fera également plus tard une matière romanesque dans Le Quatrième mur. En 1988, il obtient le prix Albert Londres pour ses reportages en tant que grand reporter en Irlande et au Liban et en tant que chroniqueur judiciaire, après avoir couvert le procès de Klaus Barbie qui se tient en 1987 à Lyon. 

Sorj Chalandon réalise également des reportages sur les conflits au Tchad, en Somalie, en Irak et en Iran pendant la guerre du Golfe. 

En 2007, après 33 ans passés au journal Libération, il quitte son poste à la suite de désaccords politiques et rejoint la rédaction du Canard Enchaîné en 2009 où il exerce encore aujourd’hui. 

 

Un écrivain reconnu et récompensé 

Sorj Chalandon entre en littérature de manière tardive, à 53 ans. En 2005, il signe son premier roman, Le Petit Bonzi, l’histoire de son double fictionnel : un enfant de 12 ans qui souffre de bégaiement et d’un manque d’amour. Ce premier livre marque un jalon, celui, pour lui, d’exorciser ses souffrances par la littérature. La figure de l’enfant malaimé réapparaîtra dans son roman L’enragé, publié en 2023, qui raconte l’histoire de Jules Bonneau, fugitif de la colonie pénitentiaire de Belle-Île. Inspiré d’un fait divers, l’écrivain imagine dans ce roman le destin de ce garçon fugitif pour qui la vie avait mal commencé. 

En 2006, le deuxième roman de Sorj Chalandon, Une promesse, qui explore les thèmes de la fraternité et du secret, lui vaut le prix Médicis. En 2008, il publie Mon traître, couronné de plusieurs prix dont le Prix Joseph Kessel et le Prix Jean-Freustrié. Avec Mon traître, Sorj Chalandon se saisit pour la première fois de son expérience de Grand Reporter pour en faire une matière littéraire. Il y raconte l’histoire de la guerre en Irlande du Nord et d’une amitié déçue entre le narrateur parisien et Denis Donaldson, un héros proclamé de l’IRA qui se révèle être un agent double du Royaume Uni. La figure du traître, qu’il a véritablement rencontré en Irlande pendant la guerre, et qu’il reconnaît dans la figure de son père, le hante et l’interroge. Quelques années plus tard, en 2011, dans Retour à Killybegs, il revient sur la figure du traître et imagine sa vie, comme pour tenter de comprendre et d’exorciser ce qui l’habite. Retour à Killybegs lui vaut le Grand Prix du Roman de l’Académie française. 

La guerre reviendra aussi dans son œuvre en 2013, celle du Liban cette fois, dans Le Quatrième mur qui met en scène son double littéraire, Georges, un homme de théâtre qui assiste au massacre de Sabra et Chatila, celui de populations palestiniennes par des milices chrétiennes pendant la guerre civile en 1982. 

Après la guerre et la trahison, Sorj Chalandon, qui avait déjà signé La légende de nos pères en 2009, une enquête démasquant un faux Résistant, revient à l’un de ses autres motifs littéraires récurrent : celui du père. En 2015, l’écrivain signe Profession du père, livre qu’il dit avoir porté toute sa vie en lui. Dans ce livre, il exhume l’histoire de son père, mythomane, pour raconter les délires du père d’un double fictionnel, enfant, le jeune Émile. La figure paternelle fera de nouveau surface dans Enfant de salaud en 2021, où l'on suit sa quête de la vérité sur le passé trouble de son père alors qu’ils assistent tous deux au procès de Klaus Barbie à Lyon. 

Sorj Chalandon a publié plus de dix livres chez Grasset et au Livre de Poche. 

Plusieurs de ses romans ont été adaptés au cinéma et en bande dessinée. Il fait partie des écrivains contemporains les plus lus et récompensés.

 

Lucile Charlemagne