Présidé par Christine Angot, le jury du prix littéraire des Inrockuptibles a dévoilé les lauréats de ce dernier. Parmi les cinq ouvrages récompensés, trois sont issus de nos maisons d'édition.
Catégorie roman ou récit français : Quand tu écouteras cette chanson de Lola Lafon
Événement de la rentrée littéraire, Quand tu écouteras cette chanson, publié aux éditions Stock, raconte la nuit qu'a passée Lola Lafon au musée Anne Frank en août 2021. Au coeur de l'Annexe, elle nous invite à poser un nouveau regard sur cette jeune femme juive qui rêvait de devenir journaliste ou écrivaine.
En revenant sur ses traces, Lola Lafon offre enfin un portrait unique d'Anne Frank. Elle s'interroge : doit-on qualifier son Journal de témoignage, de testament, d'oeuvre ? En se gardant bien d'en faire le symbole d'une quelconque cause, Lola Lafon réhabilite et brosse le portrait d'une adolescente qui ne demandait qu'à vivre.
Catégorie premier roman ou récit : Les gens de Bilbao naissent où ils veulent de Maria Larrea
La plume enlevée de Maria Larrea, pleine d'image et d'esprit, a remporté les suffrages du jury. Avec Les gens de Bilbao naissent où ils veulent (Grasset), Maria Larrea reconstitue le puzzle de sa mémoire familiale et nous emporte dans le récit de sa vie, plus romanesque que la fiction.
L’histoire commence en Espagne, par deux naissances et deux abandons. En juin 1943, une prostituée obèse de Bilbao donne vie à un garçon qu’elle confie aux jésuites. Un peu plus tard, en Galice, une femme accouche d’une fille et la laisse aux sœurs d’un couvent. Elle revient la chercher dix ans après. L’enfant est belle comme le diable, jamais elle ne l’aimera. Le garçon, c’est Julian. La fille, Victoria. Ce sont le père et la mère de Maria, la narratrice.
Catégorie essai : Troublante identité de Paul Audi
Dans son autoportrait philosophique intitulé Troublante identité (Stock), Paul Audi affronte le plus épineux des problèmes, celui que nous pose notre identité. Né au Liban et se voulant « plus français que les Français », Paul Audi se livre à une analyse rigoureuse et sensible des mécanismes combinés de la honte, de l’asservissement au regard des autres et de la haine de soi. Pour pénétrer les arcanes de son trouble et mettre en échec le démon de l’appartenance, il emprunte les chemins que lui désignent la relecture de certaines œuvres, notamment littéraires et cinématographiques.
Mais c’est à travers une réflexion sur l’identité juive, jusqu’au bouleversant épilogue, que ce texte à la première personne acquiert sa portée véritable : trouvant une sortie au désespoir identitaire, il met au jour une éthique de la cohabitation avec soi, dès lors que l’on a déposé les armes si longtemps brandies contre soi. Un texte aussi passionnant que poignant, à qui le Prix Les Inrockuptibles a été remis dans la catégorie essai.
Shannon Humbert.