Le doigt du malin qui désigne mes lectures m'a fait enchaîner "Bon rétablissement" de Marie-Sabine Roger (La Brune) et cette "Liste de mes envies". Je me venge de leur "sucrosité" [néologisme du vocabulaire œnologique] en liant les deux commentaires. L'un et l'autre font dans l'ordinaire, donnant la parole à ceux dont le discours populiste dit qu'on ne leur donne jamais la parole. " Et nous, les petits, les obscurs, les sans-grade "... La tirade de Flambeau leur rend les honneurs, sous la plume d'Edmond Rostand dans L'Aiglon. Mais, que peut-il leur arriver qui inspire le roman ?
Comme à tout un chacun, l'accident (ou la maladie) et l'hôpital (premier livre) ; ou, comme à personne, le gros lot et les millions (livre suivant). A cet accablé du destin et à cette élue du hasard que n'ont corrompus ni l'argent, ni le sexe, ni le pouvoir, leur Pygmalion prêtent naturellement de bons sentiments... Stop, catéchisme "gidien" : "Ce n'est pas avec de bons sentiments qu'on fait de la bonne littérature", credo auquel j'adhère, renseignée par la longue file des rayons de ma bibliothèque.
A partir de là diverge mon jugement sur les deux romans. A force de sirop, "Bon rétablissement" écœure la bonne volonté et décourage le goût, quand Grégoire Delacourt, publicitaire chevronné qui débute en écriture (deuxième roman), relève le plat et accroche l'attention. Cuisinier averti, il livre avec "La Liste de mes envies" une variation sucrée-salée qui flatte les papilles sans prétendre à la haute gastronomie.