Mehdi Ouraoui en un clin d’œil
Ancien enseignant en sciences politiques, Mehdi Ouraoui a exercé plusieurs métiers au sein du Parti Socialiste. Il est également l’auteur du podcast « On relève la tête », sur des sujets politiques. En 2014, il publie un essai chez Michalon : Marine Le Pen, notre faute. Essai sur le délitement républicain. Avec Mon fantôme qui figure dans la rentrée littéraire Fayard de l’automne 2023, il signe son premier roman.
Pourquoi on aime Mon fantôme
Mon fantôme raconte l’histoire de Mehdi, un professeur de latin au lycée Henri IV, qui semble être en proie à une crise de la cinquantaine. Divorcé de Cécile, qui a trouvé un nouvel amour en la personne de son naturopathe, Mehdi est père de deux enfants : Jalil le fils aîné, parti vivre dans la Silicon Valley avec sa famille, qui se manifeste à travers des SMS pleins de bons sentiments dans toute circonstance, et Norah, la benjamine, végane et très engagée politiquement contre le racisme et la misogynie envers et contre tout, surtout contre son père. Le 24 décembre 2018, une nouvelle rencontre perturbe la vie de Mehdi, pour le meilleur et pour le pire. Il s’agit de Rachid Taha, plus exactement, de son fantôme, puisque le chanteur algérien est mort en septembre de la même année.
Ce compagnon, aussi discret qu’encombrant, suit Mehdi dans sa vie, épisodiquement et de manière de plus en plus récurrente au fil du temps. Le fantôme, comme un ami imaginaire qui comble l’ennui et la solitude, semble relié à un mystérieux cartable dont Mehdi a oublié l’origine. Il mène l’enquête.
Le décor est posé, ce héros ordinaire vit des aventures : sa traduction des Héroïdes d’Ovide l’amène à avoir son quart d’heure de gloire dans l’ancienne émission culte d’Augustin Trapenard, « Boomerang », et, par la même occasion, à rencontrer l’amour en la personne de Zélie, une jeune femme fan d’écrivains et de peintres, elle-même artiste. Au fil du récit, on découvre l’histoire de cet homme ordinaire confronté à des événements hors-du-commun, jusqu’au point final qui éclaire la manière bancale dont ce personnage vit sa vie.
Avec Mon fantôme, Mehdi Ouraoui signe un premier roman à l’humour parfois grinçant et il réussit la gageure, malgré la légèreté apparente, d’aborder des sujets éminemment actuels et profonds : le conflit générationnel, le racisme, l’absence et d’autres encore qu’on ne peut dévoiler ici sans révéler la fin bouleversante du roman.
La page à corner
« Jusqu’ici, j’ai tout traité avec légèreté, voire avec inconséquence – si, si, j’en suis conscient, je plaide coupable –, mais, pour la première fois depuis l’apparition de Rachid, je reconnais une pointe d’inquiétude, davantage même, disons une trouille significative, parce que, et là le mystère s’épaissit alors qu’on espérait sortir du brouillard, j’ai beau chercher, je n’ai absolument aucune idée de la provenance de ce cartable et m’en sens un peu coupable. Coupable : le mot qui me définit sans doute le mieux aux yeux de Norah. Coupable, papa, coupapable, incapable, mais de quoi ? De la comprendre, incapable de retenir sa mère, coupable des mille autres chefs d’inculpation dont j’étais déjà coupable à la naissance. Pas la mienne, la sienne. Ce que les filles reprochent aux pères quand ils cessent d’être des héros. Ça lui passera. En attendant, elle fait chier. Hier, la boîte à bac où sa mère a réussi à la scolariser pour finir l’année m’a appelé. Le proviseur, puisqu’on appelle quand même ça un proviseur et non un prestataire de service ou un maître- chanteur-sauveteur, dénominations commerciales que justifierait amplement le tarif du bordel en question, le proviseur, et non l’épicier ou le profiteur, donc, s’est fait un plaisir d’informer le prétentieux professeur d’Henri-IV que je suis que sa fille avait une nouvelle fois enfreint les conditions générales d’utilisation, qu’on appelle le règlement intérieur par parallélisme des hypocrisies. Norah a, selon son explication, « peint le nom d’une victime du racisme d’État tuée par la violence policière au fronton de chaque salle de cours ». Soit, dans le désordre : Salle Adama Traoré, salle Zyed et salle Bouna (chacun la sienne), salle Malik Oussekine, salle Ali Ziri, salle Lamine Dieng… Sur sa plaquette promotionnelle, l’institution Saint-Jean-de-la-Croix s’enorgueillit d’habitude de ses 45 salles « d’un confort moderne propice à une atmosphère studieuse ». Norah fait vraiment chier. Taha me presse de questions, mais je ne retrouve ni facture, ni indice, ni souvenir. J’examine le sac, machinal, réflexe absurde puisque c’est le mien. Sous mon fatras de copies, de papiers divers et de vieux journaux, un carton à impression gaufrée dont les bords portent un luxueux liseré bleu roi : « Bon anniversaire ». » p. 67-68
La presse en parle
Mehdi Ouraoui, "Mon fantôme" (Fayard)
Convoquant le souvenir du chanteur Rachid Taha, Mehdi Ouraoui livre un premier roman sensible et très politique. Jean-Claude Perrier – Livres Hebdo
Faut-il lire "Mon fantôme", de Mehdi Ouraoui ? C'est un premier roman, une histoire de fantômes drôle et émouvante.
Parmi les 74 premiers romans français de cette rentrée littéraire, il y en a un qui m’a particulièrement plu, qui m’a fait rire, qui m’a ému, avant de me bouleverser dans un renversement final qu’évidemment je ne raconterai pas. Ce roman s’intitule Mon fantôme et il est signé Mehdi Ouraoui aux éditions Fayard. C’est l’histoire d’un prof de latin au lycée Henri IV de Paris. Il se prénomme Mehdi comme l’auteur. Il est né d’un père algérien de confession musulmane, et d’une mère française ; il a grandi à Bayonne. Mehdi vient de signer une traduction d’Ovide qui lui vaut d’être invité sur France Inter dans l’émission Boomerang d’Augustin Trapenard car l’action, c’est important de le dire, se déroule en 2019. Arnaud Viviant - France Inter
« Mon fantôme » : Celui de Mehdi Ouraoui s’appelle Rachid Taha
Pourquoi ce livre ? Parce que les histoires de fantômes sont toujours intrigantes mais ici, pas de château hanté ou de légende. Nous sommes à Paris et le fantôme en question n’est autre que le chanteur Rachid Taha. Pourquoi lui ? Vous le découvrirez au fur et à mesure de ce récit à la fois lunaire, poétique, absurde parfois mais terriblement actuel et qui délivre un message d’espoir. Christian Dorsan – 20 Minutes
Lucile Charlemagne